jeudi 9 mai 2019

Enemies of the People

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La révolution communiste d'inspiration maoïste, instaurée par les Khmers rouges au Cambodge à partir du 17 avril 1975, s'est développée dans une incessante paranoïa meurtrière pendant trois ans, huit mois et vingt jours. Elle a plongé le pays dans un état de souffrance  et de dénuement inimaginable. On a bien du mal à comprendre, aujourd'hui, l'envergure et l'atrocité des exactions commises sous le régime de Pol Pot par les Khmers rouges. Les responsables de cette extermination de masse sont à chercher parmi les dirigeants du PCK (Parti communiste du Kampuchéa), qui ont  imposé au peuple cambodgien un nouvel ordre social et  un régime de terreur. Avec à  la tête du PCK, leur chef incontesté, Pol Pot. Surtout ne pas se fier à son air affable et à son sourire charmeur. Les pires criminels ne sont pas les monstres austères que l'on croit. Pol Pot appliquera jusqu'à l'extrême cette maxime si chère à Staline : Gouverner avec une main de fer dans un gant de velours.
Interviewé par le journaliste américain 
Nate Thayer en 1995, Pol Pot se calfeutre dans le déni total, et se dédouane entièrement des crimes. Il se dit patriote, aime son pays et a la conscience tranquille. Tout juste, admet-il, du bout des lèvres, quelques petites erreurs... Je reste effaré, consterné devant tant d'aveuglement et de lâcheté. Mais, au fond, je ne suis pas surpris, combien de grands criminels reconnaissent leurs méfaits, leurs crimes, et assument, pleinement, la responsabilité de leurs actes ? Nous étions des bébés, apprenant à marcher, se défend-il encore face à Nate Thayer ! Je m'associe avec David Chandler quand il écrit si justement dans son livre, S-21 ou le crime impuni des Khmers rouges : «Il est facile de comprendre que Pol Pot veuille nier toute responsabilité et qu'il s'apitoie sur lui-même. Mais la comparaison entre le Kampuchéa Démocratique et un gigantesque bébé trébuchant en parcourant les campagnes cambodgiennes et infligeant ainsi des dégâts colossaux défient toute analyse.»


Certains intellectuels et historiens ont avancé et inventé le concept d'auto-génocide  pour décrire et analyser ce qui s'est passé au 
Kampuchéa démocratique.  Quelle ineptie ! Quelle  absurdité ! Comme si les Cambodgiens s'étaient eux-mêmes donné la mort, comme un désespéré mettrait volontairement fin à ses jours ! Le génocide n'est pas le fruit d'un suicide collectif, mais d'un parti politique, de ses dirigeants, qui à travers leurs discours en ont exposé et encouragé sa mise en œuvre. Il faut lire les discours de Pol Pot pour se rendre compte à quel point  la lutte révolutionnaire est hantée par  l'idée de pureté idéologique. Il faut épurer le Parti, le pays, de ses ennemis. Les ennemis de l'intérieur, les ennemis «cachés» et ceux qui sont à la solde de la CIA, du KGB, ou du Vietnam. Ils sont intrinsèquement impurs et s'immiscent, tels des vers ou des microbes, dans le corps sain du peuple révolutionnaire. Pour éviter l'infection et l'épidémie, un seul remède, l'extermination.
À partir de 1977, les purges s'intensifient, et plongent le pays dans une  terreur absolue. 
Pol Pot pousse son délire paranoïaque dans une logique proprement kafkaïenne : chacun est à même d'avoir enfoui, dans sa conscience et ses pensées, des attitudes bourgeoises. Cadres khmers rouges et dirigeants compris... L'ennemi, le traître, est partout. La boucle est bouclée.   




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Dans 
Enemies of the People, le journaliste cambodgien, Thet Sambath, revient sur ce passé douloureux et essaye de comprendre pourquoi son pays a basculé dans l'horreur et la terreur.  Il entreprend de vouloir approcher Nuon Chea, figure emblématique et historique des Khmers rouges, ex-numéro deux du régime, chargé de la Propagande et de l'idéologie communiste. Jour après jour, il va patiemment tisser  avec cet octogénaire au visage de marbre, une relation particulière, afin de gagner sa confiance, et d'obtenir de lui, un début d'explication.
Ce n'est qu'au bout de la troisième année que 
Nuon Chea se décide enfin à parler, et à révéler, pour la première fois, devant la caméra,  la responsabilité des dirigeants du Comité Central du Parti dans l'élaboration des purges. À travers ses confessions, on est frappé, encore aujourd'hui,  par l'obsession maladive et la psychose anti-vietnamienne, qui ont nourri l'idéologie des Khmers rouges. Parallèlement, Thet Sambath interroge d'anciens tortionnaires devenus de bons pères de famille, les questionne sur les méthodes glaçantes d'exécution, et met au grand jour un passé pas si lointain, que d'aucuns voudraient bien oublier...



Bonus :

-  Déniché dans 
Libération, un portrait du journaliste Nate Thayer :

  http://www.liberation.fr/portrait/1997/08/07/nate-thayer-journaliste-americain-plutot-idealiste-a-eu-le-leader-khmer-rouge-qu-il-guettait-depuis-_213547
Le Mystère Pol Pot (60mn - MKV) : un portrait en forme de biographie du très mystérieux Pol Pot, avec des extraits d'interviews de Nate Thayer.
-
Pouvoir et Terreur ( 64mn - MKV) :  truffé d'archives, cet excellent doc revient sur ces terribles années qui ont marqué l'histoire du Cambodge.
- Laure Adler reçoit François Bizot. (France Culture - 45 mn - Flac)
- Rithy Panh et Jean Hatzfeld  (France Inter - 55 mn Flac) : comment peut-on écrire sur le génocide ?
- Comment filmer les bourreaux ? (France Inter 50 mn - Flac)
- Le procès des Khmers rouges (France Culture - 29mn - Flac) avec 
Rithy Panh.
- Un juge face aux Khmers rouges (France Culture - 30mn - Flac)  De la nécessité de juger les dirigeants Khmers rouges 30 ans après les faits.
- Extrait d'
Apostrophe du 29/02/1980, consacré au fanatisme et aux fanatiques, avec le témoignage de Pin Yathay qui présente son livre l'Utopie meurtrière.
- Jacques Chancel reçoit le 18 décembre 1979 le 
Prince Sihanouk qui fait part de son désarroi sur l'état de son pays. On ne peut pas lui donner tort...
- Jacques Chancel le 16 Juin 1977 s'entretient avec le prêtre 
François Ponchaud  à propos de la sortie de son livre  Cambodge année zéro.
Norin Chai (France Inter - 54mn - Flac)
- Sothik (France Culture - 33mn - Flac)  
Marie Desplechin  a publié Sothik, récit écrit avec Sothik, enfant victime des Khmers rouges.- Extraits de Cambodge, je me souviens, deux très beaux poèmes écrits par Méas Pech Métral.
Projection privée : Rithy Panh (France Culture - 50 mn - Flac) : le cinéaste revient sur son film l'image manquante.
Kermite.
    


Lien :

https://uptobox.com/gfennuqipkjp


https://1fichier.com/?iy4pfzykzl444mgw7eri
TVRip (720x576)

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